Everwood - Bilan de la saison 1

Saison 1 : Everwood, une saison entre le père et le fils

 

Soyons franc, je ne suis pas là pour faire une revue béate de la série en disant que tout est bien et magnifique. La saison 1 a connu de bons épisodes (et même de très bons) mais aussi des épisodes plus moyens, plus mitigés. Mais une chose est certaine c'est que cette première saison d'Everwood jette les bases de l'une de séries familiales actuelles les plus prometteuses et audacieuses.

A la fois émouvante, drôle et terriblement réaliste, la série jongle entre les intrigues sérieuses, voire graves (l'avortement, le deuil,…) et les intrigues plus légères qui sont parfois même à mourir de rire (Harrold lors du voyage à la montagne, l'intrigue du meurtre du chien,…) . Everwood n'est ni un Drama adolescent ni un Drama adulte mais finalement quelque chose au milieu où ce n'est pas forcement les adultes qui ont des intrigues sérieuses et les ados des intrigues amusantes.

Plus que les intrigues prises séparément, la série peut avant tout se reposer sur un éventail de personnages très riche et nombreux. Si certains personnages secondaires sont assez manichéens (Edna, Gretchen Trott, Irv…), les personnages principaux, eux, semblent eux taillé dans la pierre de la montagne bordant la ville, chacun ayant ses points forts, ses failles, ses qualités et ses défauts. Andy est certes un médecin appliqué et généreux mais il est par contre un père de famille dont les qualités pédagogiques laisse parfois (ou souvent) à désirer. La série prend aussi des risques en ayant comme personnage féminin numéro 1 une jeune fille qui peut à la fois se montrer sympathique et touchante et la seconde d'après manipulatrice et égoïste. Comme leur personnage, les acteurs sont aussi d'une grande classe à commencer par ce vieux briscard de Treat Williams campant à la perfection ce père de famille désorienté et gauche et Gregory Smith qui retranscrit le malaise adolescent par un simple regard. " Jamais un regard figé n'avait exprimé autant de chose " m'a dit quelqu'un après avoir vu la scène où Andy révèle à Ephram la vérité sur leur venue à Everwood, et c'est bien vrai cela. Sans parler de Tom Amandes qui ajoute une note décalée particulièrement savoureuse à la série.

Les intrigues comme je l'ai dit plus haut peuvent être diverses mais j'y reviendrai plus loin. Mais en dehors des intrigues hebdomadaire, deux intrigues sont suivies en continu et en parallèle : l'intrigue de la relation Andy/Ephram et celle liée à au coma de Colin et à son rétablissement. Pour cela aussi je vous conseille de lire les analyses du parcours des personnages dans la section " personnage " du site.

Je ne reviendrai pas sur l'histoire de la série proprement dite. J'aimerai plutôt aborder ici les différents thèmes qui ont traversés la première saison de la série.

 

Les thèmes de la saison :

 

Relation parent / enfant :

C'est le thème principal de la saison et plus spécifiquement la relation père, enfant.Andy est novice dans ce domaine, ayant laissé cette part de travail à sa femme et il se rendra compte que si l'implication dans la vie de ses enfants à des conséquences, sa non implication en a aussi. Si les choses se passent bien avec Delia, le conflit est ouvert avec Ephram et tout les prétextes sont bons pour se crier dessus et se faire des reproches. Malgré leurs disputes très vives et douloureuses on sent un profond amour qui lie le père et le fils chacun faisant partie de l'autre et ayant besoin de l'autre. Montrant ainsi que le lien père, enfant est un lien très solide et que malgré les difficultés il ne peut être nié.

Du côté d'Harrold Abbott, les relations père, enfant semblent plus faciles à première vue. Harrold a de bonnes relations avec Bright et Amy. Même si le docteur Abbott est vieux jeu, plein de principe et routinier, passer du temps avec ses enfants fait aussi partie de sa routine comme aller dîner chez Gino Chang avec Amy, assister aux matchs de basket de Bright. Ce sont les petites attentions, les petites marques d'affections qui font toute la différence. Pas besoin de grand coup d'éclat ou de " je t'aime mon fils, ma fille " à tout bout de champ mais de petites choses. Choses qui par exemple ont manqué à Ephram où le jour même de sa naissance Andy était en pleine opération.

Le thème parent, enfant ne se retrouvent pas uniquement chez les deux médecins mais est beaucoup plus encré dans les intrigues de la saison 1 comme avec la relation Edna / Harrold , l'amour paternel et filial qui lie toujours Harrold à son défunt père, le comportement agité de Sam (le fils de Nina) dû à l'absence de Carl et bien sûr toute la trame liée à Colin et à ses parents qui sont tellement attachés à lui et qui veulent tellement croire que tout va bien qu'ils ferment les yeux sur la lente dégradation de leur fils et qui rejettent le docteur Brown parce qu'il leur crie une vérité trop dure à entendre. On retrouve également le thème dans des intrigues plus que secondaires comme celle de ce fils qui vient trouver le docteur pour qu'il aide son père soufrant du dos.


Le changement, la reconstruction de la vie et la fuite de la réalité :

C'est le deuxième grand thème de la saison. Quand Andy perd sa femme, toute sa vie s'écroule et il fait ce que tout homme dans cette situation ferait : il disparaît. Il quitte New-York et ses fantômes pour Everwood dans le Colorado. Ce changement ne sera pas facile et semé d'embûche comme notamment avec sa relation avec Ephram (voir relation père / fils). Mais c'est aussi professionnellement que ce changement opère. Andy est passé de médecin New-Yorkais huppé, à médecin d'une petite ville comme Everwood. Là aussi l'acclimatation ne sera pas facile et Andy sera parfois dépassé par son travail. Ne sachant pas où il doit s'arrêter, Andy essayera dès le début d'en faire trop et délaissera vite à nouveau sa famille et se sera au docteur Abbott de lui rappeler qu'il doit se fixer des limites avec ses patients et que sa vie professionnelle ne doit pas venir menacer sa vie personnelle. Si Andy s'installe à Everwood c'est aussi par culpabilité de n'avoir su être un meilleur mari et un meilleur père et il fuit donc New-York, ville moderne, continuellement en mouvement, symbolisant la réalité pour rejoindre cette petite ville idyllique bordée de montagne où tout semble possible et tout recommencer.

Ephram lui a beaucoup de mal à se faire à ce changement de lieu mais aussi à ce changement de vie. Ayant perdu sa mère, qu'il aimait tant, il ne peut plus continuer comme avant et se renferme de plus en plus sur lui même et va jusqu'à y abandonner sa passion pour le piano. Tout cela étant lié à son conflit avec son père comme le suggère Matt le prof de piano à son père. Ephram doit apprendre à se reconstruire et à trouver de nouveau repère dans cette ville qu'il déteste même s'il comprendra peu à peu que celle ci fait désormais de lui.

Le changement est aussi au centre de l'intrigue de Colin. Sorti du coma, Colin ne sera plus le même. Désormais il y a un avant et un après accident pour lui. C'est un changement radical pour lui, encore plus dure à accepter vu qu'il n'a aucun souvenir de celui qu'il était avant. Et c'est surtout ça qui le fait souffrir et c'est tout naturel qu'il se tournera vers Ephram qui lui ne le connaissait pas avant l'accident et qu'il n'a donc aucune attente particulière le concernant. Le changement de Colin comme celui d'Andy ne concerne pas que lui-même et affecte aussi les autres. Les premiers à souffrir de ce changement sont ses parents (mais cela n'est pas vraiment montré à l'écran, même c'est une évidence) ainsi qu'Amy et Bright.

Amy elle aussi fuit la réalité depuis l'accident de Colin, ne vivant plus que dans l'attente du réveil de son prince charmant. Amy s'investit tellement dans sa relation avec Colin qu'elle en perd même complètement son objectivité quand il s'agit de son petit ami et entrer carrément dans une sorte d'aliénation qui la poussera notamment à rejeter petit à petit tout les gens qu'elle connaît avec en première ligne Ephram, son père Harrold et son frère Bright.

L'intrigue médicale :

Vu le thème de la série, il est normal d'avoir des intrigues en rapport avec les patients des deux docteurs de la ville, les docteurs Brown et Abbott. Intrigue indépendante dans le récit celle ci concerne prioritairement Andy et lorsque Harrold y est impliqué c'est souvent pour contrebalancer le discours de son collègue. Malheureusement cette intrigue médicale est souvent le point faible de la saison car anecdotique ou farfelue ou sans réel rapport avec les autres intrigues en cours même si souvent il y a un rapport presque infime entre le patient et ce qui se passe dans la vie d'Andy à ce moment là.

L'intrigue médicale se présente souvent en trois phases : apparition du malade, établissement des différentes possibilités qui s'offre à lui et prise de décision du patient sans pour autant nous montrer que celle ci est la plus souhaitable. La décision appartient au patient. Comme le dit Andy à Kate (1.21 cas de conscience), la décision qu'elle prendra sera forcement la bonne car ce sera la sienne. La voix de Irv va dans ce sens lors de son speech final (1.23 A la vie, à la mort) en disant que la décision de Colin lui appartient.

L'intrigue médicale n'est par contre jamais meilleure que lorsqu'elle touche un personnage récurent de la série. Cela permet d'approfondir certains personnages ou d'en connaître plus sur eux ou même cerner les relations entre les différents personnages( 1.03 la grossesse de Nina, 1.10 la crise d'appendicite de Bright).

L'intrigue médicale est aussi l'intrigue par laquelle Everwood prend parfois le plus de risques en prenant position sur des thèmes à la fois intéressants mais qui font beaucoup réagir dans un sens comme dans l'autre. Il y a notamment cette intrigue sur les mères porteuses avec Nina et le fait de savoir si une femme peut être une bonne mère quel que soit qu'elle a. Il y a également (et surtout) cette intrigue sur l'avortement dans l'épisode 1.21 qui est à la fois traité avec pudeur et réalisme mais qui pose beaucoup de questionsans pour autant en donner les réponses.


La vie amoureuse:

Ce n'est certes pas le thème le plus original vu que celui ci se retrouve dans un très grand nombre de série. Everwood montre néanmoins par ses personnages que l'amour est peut être vécu de différente manière.

L'amour fusionnel vécu par Amy vis à vis de Colin. Après l'accident elle n'a vécu que dans l'espoir de son réveil, une fois sorti du coma elle a tout fait pour ne vivre que dans sa petite bulle dont seuls elle et Colin sont les résidents et rejette ceux qui pourraient mettre en danger son bonheur. L'amour quand il est trop fusionnel n'est jamais bon car l'on se fond d'en l'autre sans savoir qui l'on est vraiment en dehors de cet amour.

L'amour au delà de la mort. Même morte, Andy continue d'aimer Julia. C'est pour cela qu'il s'est installé à Everwood pour lui prouver son amour. Une blessure qui n'est toujours pas refermée qui l'empêchera de s'engager dans une relation avec Gretchen Trott, car rien n'est fini entre lui et Julia.

L'amour à tout âge : Edna et Irv se sont connus sur le tard, après un veuvage pour elle, après un divorce pour lui, mais cela ne les empêche pas de vivre pleinement leur relation. Conscient de cette chance ils la vivent à 100 à l'heure, préférant avoir des remords que des regrets. L'amour n'a pas d'âge c'est bien connu. On peut rencontrer le grand amour à 12 ans, 15 ans, 20 ans, 30 ou plus, l'important est d'être heureux avec celui qu'on aime et de profiter de la vie.

L'amour au quotidien : Everwood montre aussi par le couple Abbott que l'amour peut être routinier, voir ennuyeux, que le couple marche plus par habitude que par une réelle preuve d'amour. Certaines personnes voient cela chez leurs parents, qui même si ce n'est plus l'amour fou restent ensemble car " trop vieux pour refaire sa vie " comme on dit ( adage remis en question par Edna et Irv). L'amour est un combat au quotidien et une petite attention, une phrase gentille, un geste attentionné peut parfois tout changer.

L'amour non partagé : Il est déjà parfois assez dur de maintenir son couple à flot quand les deux veulent croire à celui ci, il est donc d'autant plus difficile quand celui n'est pas partagé. C'est le douloureux constat que devra faire Ephram en ce qui concerne Amy. Il y a bien une belle amitié entre eux, peut être un peu plus qu'une amitié mais en tout cas rien de plus. Du moins en ce qui concerne Amy. Ephram a eu un coup de foudre pour Amy quand ils se sont rencontrés mais le cœur d'Amy était pris. Ephram a respecté cela et c'est tout à son honneur.


Cela pour dire qu'en fait Everwood c'est tout sauf Ephram et Amy se lançant des regards langoureux ou s'échangeant des baisers torrides. S'il ne fallait regarder Everwood que pour l'idylle Ephram/Amy, ça ferait bout à bout dix secondes. Ça ce n'est pas moi qui le dit mais Amy lorsqu'elle parle à Colin de sa relation avec Ephram. S'il y a quelque chose entre Amy et Ephram, c'est une amitié naissante, fragile et des sentiments difficiles à gérer pour les deux adolescents. Everwood est avant l'histoire d'une ville, d'un espoir que l'on peut se reconstruire malgré les tempêtes de l'existense et repartir à zéro. Tout cela et bien plus est l'histoire d'Everwood.